En France, l’idéologie sécuritaire et la société de surveillance sont des formules phares du storytelling du XXIe siècle ! Ils en constituent deux thèmes classiques dans les commentaires d’intellectuels et de journalistes, mais aussi dans les discours de certains politiciens. Quel est le message habituel ? Celui-ci : la surveillance qui s’exerce sur chaque citoyen (en particulier dans le cybermonde) ne cesse de progresser car nous vivons dans des collectivités obsédées par le principe de précaution et les « nouveaux » risques (notamment le terrorisme). L’Etat menacerait donc les libertés individuelles, tandis qu’une idéologie sécuritaire, prônant la mise en place de dispositifs liberticides, contaminerait lentement mais sûrement les esprits, nous rapprochant insensiblement d’un régime fascisant…
Certes, la société de surveillance progresse : cependant, nul apprenti dictateur ne médite consciemment de nous l’imposer ; c’est chacun d’entre nous qui l’appelle de ses vœux parce que nous redoutons l’insécurité et que nous craignons la progression de la société de défiance. Parallèlement, la société du spectacle et la peur de l’autre (alimentée par la crise de la pensée stratégique, c’est-à-dire par notre incapacité à décrypter la grille géopolitique et géoéconomique planétaire) fabriquent une idéologie sécuritaire qui ne résulte pas d’un quelconque projet gouvernemental, quelle que soit la majorité au pouvoir.
Au final, c’est la mort du culte du progrès qui se trouve à l’origine de cette tentation de la société de surveillance et de cette idéologie sécuritaire ! Cette mort témoigne également de l’épuisement du clivage droite/gauche tel qu’il fonctionne depuis deux cents ans et démontre la nécessité de penser autrement notre démocratie.